AQMI : après Ben Laden

Deux jours après la mort du leader « charismatique » et fondateur d’Al Quaïda, une reconfiguration de ses franchises locales, et notamment d’Al Quaida au Maghreb Islamique est « attendue », selon plusieurs services de renseignements actifs dans la région sahélienne. Même si beaucoup de branches d’Al Quaïda sont historiquement issues de mouvements terroristes nationaux plus anciens, et ont fait allégeance à la nébuleuse par la suite, il existait une emprise idéologique forte de la structure créée par le milliardaire saoudien.

En effet, Oussama Ben Laden était surtout considéré par les chefs de guerre locaux d’Al Quaïda comme celui qui a permis l’internationalisation du Jihad et sa montée en puissance, s’opposant en cela à la doctrine de celui qui était considéré comme le « mentor ès fondamentalisme » du Saoudien, Abdallah Azzam (tué en Afghanistan à la fin des années 90, dans des circonstances non encore élucidées) . Azzam estimait que le Jihad armé ne représentait pas le moyen exclusif d’arriver au pouvoir, et que la conquête de ce dernier pouvait comporter des zones de compromis. Il divergea en cela fortement avec un Ben Laden dont toute l’énergie se consacra à l’élaboration et au montage d’actions terroristes spectaculaires et graduelles, allant de l’attaque de représentations américaines à l’étranger (Ambassade US de Dar Essalam, attaque contre l’USS Cole) jusqu’à l’ « apogée terroriste » du 11 Septembre 2001. En ce sens, les idées du saoudien rejoignaient quasi parfaitement la ligne du GSPC algérien, matrice fondatrice d’AQMI, dont les chefs estiment aussi que le Jihad constitue la voie exclusive, et que les musulmans « purs », ceux qui accomplissent le Jihad, permettent en réalité la rédemption et le rachat des pêchés de la « Umma Islamya » (communauté islamique) dans son ensemble. Ainsi, trois jours après la mort de Ben Laden, et moins d’une semaine après l’attentat de Marrakech, au Maroc, pour lequel les soupçons se dirigent avec insistance du côté d’Al Quaïda, il est plus que probable que l’on assiste à une reconfiguration d’AQMI , avec une résurgence des luttes de pouvoirs pour en prendre le leadership, l’autorité « suprême » que constituait Oussama Ben Laden –même s’il est à peu près établi que les chefs d’AQMI ne l’on jamais rencontré- étant désormais supprimée. Paradoxalement, la mort de Ben Laden devrait attiser les rivalités pour la prise de contrôle des franchises locales, ce qui pourrait conduire à une situation extrêmement déstabilisatrices, se soldant par leur éclatement en Katibas concurrentes, ce qui rendra l’action des services de sécurité et de rensiegnement encore plus ardue.