La hiérarchie militaire algérienne se retrouve demain, jeudi, 12 décembre, devant une sérieuse et grave épreuve, celle d’un boycott d’une élection dont elle a fait son cheval de bataille, celle aussi sur laquelle elle joue sa crédibilité, tant elle s’est totalement investie dans cette affaire, sans s’adjoindre le peuple algérien.
Les élections, qui ont commencé depuis plusieurs jours, à l’étranger, ont été boycottées par de larges franges d’algériens établis à l’étranger, selon des informations révélées par des sources algériennes non officielles. Au Canada, la participation aurait été nulle. Ailleurs, elle serait inférieure à 10 pour cent, voire 15 pour cent, selon les mêmes sources.
En Algérie, la campagne de boycott devraient être largement suivie, selon les mêmes sources, qui n’écartent pas qu’en Kabylie, où les citoyens ont décidé de «faire» fermer les bureaux de vote, avant même le scrutin, avec les briques et le ciment, dans certains cas, et sous le regard des services de sécurité qui ont apparemment reçu l’ordre de ne pas jeter de l’huile sur le feu. La participation devrait être nulle en Kabylie.
C’est là le grave pari de Gaid Salah, qui avait décidé de défier le Hirak, et partant le peuple algérien ainsi que les élites politiques de ce pays, qui réclamaient le dialogue et une transition politique, sur laquelle s’entendraient tous.
L’armée se serait sans aucun doute préparée pour un tel scénario. Dans la mesure où la commission électorale « indépendante » n’a aucune existence en dehors d’Alger, et qu’elle compte sur la logistique du ministère de l’intérieur pour l’organisation des élections, il sera facile pour l’armée de proclamer les taux qu’elle souhaite, d’autant plus que dans le sud et le rural, les candidats ne disposent d’aucun moyen de contrôle des élections. Même en supposant qu’il y’aurait des observateurs étrangers car pour l’instant, on n’en parle pas, ils seraient, comme d’habitude, conduits dans certains bureaux de vote et certaines villes acquis au système algérien.
L’armée, qui s’est investie publiquement dans ce processus, engagé par la révocation de Bouteflika, également dictée par le Général Gaid Salah, n’aurait plus aucun autre de choix que de valider ces élections et donc de fournir « un Président » au peuple algérien, malgré lui, avant de se replier dans les casernes, et de confier la sale besogne de continuer à l’heureux élu. Quel sont les différents scénarios ?
L’armée serait soucieuse de ne pas rééditer le scénario du 6 Octobre 1988, en tirant sur la foule, tuant plus de 300 personnes, à Bab El Oued, alors que des manifestants se dirigeaient vers la place des martyrs, sur une artère qui longeait la DGSA. Mais, Gaid Salah a inspecté, ces derniers jours, l’Etat-major des forces terrestres dans la capitale algérienne, un signal sur la mobilisation potentielle des troupes terrestres pour les besoins des élections. Car, ne pas maitriser matériellement l’organisation de ces élections, sans incidents majeurs, c’est perdre toute la bataille. Et dans cette hypothèse, ses co-légionnaires risqueraient de pousser leur chef à la retraite, pour se donner une nouvelle virginité et sauver ainsi la face de l’armée, qui s’est ruinée en s’investissant en politique, sans en prévoir une issue heureuse et positive.