A peine la nouvelle de sa mort transmise par l’agence de presse algérienne officielle (APS) que les spéculations vont déjà bon train sur les conditions exactes du décès du Directeur Général de la Sûreté Nationale Algérienne Ali Tounsi. Officiellement tué par un « cadre pris d’une crise de démence », il n’était un secret pour personne qu’ Ali Tounsi était depuis plusieurs mois en conflit ouvert avec Yazid Zerhouni, ministre de l’intérieur,
au point que la « démission » du patron de la police avait été annoncée à plusieurs reprises par les médias algériens. Pourtant, Zerhouni était le parrain professionnel de Ali Tounsi depuis les années 60, où il l’avait appelé à ses côtés alors qu’il n’était encore qu’adjudant de la force locale à Sidi Bel Abbès. Grimpant tous les échelons jusqu’au grade de colonel, « plafond » théorique de la carrière de ce haut cadre pour cause d’appartenance présumée à un commando de l’armée française intitulé poétiquement « Tempête »- Ali Tounsi avait réussi à se maintenir pendant plus d’une décennie à la tête de la police. Sa mort mystérieuse vient s’ajouter à une longue tradition d’assassinats encore inexpliqués à ce jour en Algérie. Ainsi, l’ancien Président Mohamed Boudiaf –rappelé en urgence d’un exil marocain de plus de vingt-huit ans- aurait été tué par un sous-lieutenant de sa garde personnelle, Lambarek Boumaarafi le 29 Juin 1992. L’ancien premier ministre et ancien patron de la sécurité militaire, Kasdi Merbah, succomba à un attentat perpétré par un mystérieux escadron de la mort en 1993. Plus exotique, l’ancien ministre des affaires étrangères Mohamed Seddik Benyahia, a, quant à lui, succombé à un …tir de missile Irakien, alors qu’il revenait de mission en Syrie en mai 1982. Ces trois cas emblématiques ont tous fait l’objet de communiqués laconiques de la part des pouvoir publics algériens. Néanmoins, la mort d’ Ali Tounsi est probablement emblématique de quelque chose de beaucoup plus profond qui traverse les cénacles algériens depuis plusieurs mois, une certaine ambiance délétère, sur fond de grands procès économiques, où sont systématiquement visés les proches du Président Bouteflika. Egalement visés, tous ceux qui ont participé au système mis en place par le « cardinal » Larbi Belkheir, deus ex machina des années noires algériennes de la fin de règne de Chadli Bendjedid jusqu’à l’arrivée au pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika. Or, Belkheir vient de décéder à Alger il ya moins d’un mois, et le Président Bouteflika s’est très ostensiblement absenté de ses funérailles pluvieuses, prétextant une réunion de l’Union Africaine à laquelle il ne pouvait -officiellement- se soustraire….Sommes nous en train d’assister à la fin de l’ère Bouteflika ? Tout porte à la croire, tant la mécanique froide mise en branle depuis un semestre s’inscrit dans la stratégie « classique » de la sécurité militaire algérienne. Cette dernière, avec à sa tête Mohamed Toufik « Médiène », inamovible général de corps d’armée à la tête du renseignement algérien, est en effet en première ligne dans les investigations liées aux malversations présumées qui auraient eu lieu dans les deux grands dossiers qui occupent l’espace médiatique algérien : le scandale de la Sonatrach et le versement de commissions pour la construction de l’autoroute Est-Ouest. Il ya fort à parier que les condamnations frapperont quasi exclusivement des proches de la Présidence…