Sa voix douce et pondérée a trompé nombre de ses adversaires qui y voyaient un signe de timidité, mais le Président sortant du Togo, Faure Gnassingbé, aura réussi de manière florentine à empêcher l’opposition de se regrouper, et devrait logiquement être reconduit à la tête de son pays ce vendredi 5 mars. D’après de nombreux relais sur place, les partisans de « Faure »
auraient déjà procédé au regroupement des résultats des comptes effectués avant que les urnes ne soient envoyées à la Commission Electorale Nationale Indépendante, et ces derniers donneraient leur protégé largement en tête du scrutin, avec plus de 50% des suffrages exprimés en sa faveur. Ces résultats partiels ont de quoi faire enrager les adversaires politiques du Président sortant, qui espéraient cristalliser le mécontentement populaire sur la Présidence togolaise. Il semble que les six candidats en lice, dont une femme, n’aient pas réussi à mobiliser un réservoir de voix assez important en dehors des zones urbaines, et que les populations rurales, historiquement disciplinées, se soient rendues aux urnes en masse, ce qui favorise le candidat sortant. L’enjeu était de taille, car Faure gardait en lui une sorte de « blessure » suite aux évènements qui avaient entachés son élection à la magistrature suprême en 2005, et il n’a eu de cesse lors de cette campagne de répéter sa volonté de voir les élections se dérouler dans le calme et la paix. Pourtant, le calme relatif dans lequel s’est déroulé le vote hier n’était pas acquis d’avance, car plusieurs observateurs avaient remarqué que le dernier meeting de l’Union des Forces de Changement (UFC), s’était déroulé dans une atmosphère particulièrement électrique, le candidat du principal parti d’opposition, Jean Pierre Fabre, ayant réussi finalement à ramener le président de son parti, Gilchrist Olympio, qui jusqu’alors l’avait soutenu en se pinçant le nez. Or, Gilchrist- qui était l’opposant « historique » au père de Faure Gnassingbé, le Général Eyadéma- avait été éliminé de l’élection présidentielle pour raisons médicales, n’ayant pu produire un certificat répondant aux normes constitutionnelles. Ceci avait contribué à fragiliser un peu plus une opposition déjà morcelée par l’arrivée inattendue d’un nouvel entrant, l’ancien secrétaire d’Etat de François Mitterrand Koffi Yamgnane, qui lui aussi sera éliminé par la cour constitutionnelle, faute de n’avoir pu prouver sa résidence au Togo depuis un an au moins. La combinaison de ces éléments aura finalement constitué une subtile « alchimie » que seuls les togolais sont à même de comprendre. Le Togo se réveillera donc probablement avec un Président Faure reconduit dans son fauteuil et au pouvoir renforcé afin de poursuivre les réformes structurelles nécessaires afin de sortir le pays de la situation économique difficile qu’il traverse. Faure a pour cela un atout de taille, le soutien américain et chinois, avec chacun une logique bien précise. Côté US, le Togo est considéré comme un pays stratégique pour la lutte contre le Narcotrafic. Côté chinois, le port de Lomé, ainsi que le potentiel minier du pays aiguise les convoitises de Pékin. Jusque-là, Faure a bien su jouer sur ces deux tableaux pour préserver les intérêts de son pays et de la Présidence.