Dans le procès de l’ancien président tchadien Hissène Habré qui va se tenir au Sénégal dans quelques mois, les familles des victimes de l’ancien régime et l’Etat tchadien se font la guéguerre par avocats interposés. D’abord, face à l’exigence du transfèrement des potentiels témoins, les deux parties n’arrivent pas à accorder leurs violons.
Les familles des victimes accusent le régime de ne pas collaborer suffisamment dans la préparation du procès contre l’ancien président Hissène Habré. Un de leurs avocats dénonce que l’Etat tchadien ne veut pas procéder à la remise des personnes actuellement détenues à Ndjamena. Une accusation que rejettent pour leur part les avocats du Tchad qui mettent en avant l’accord de coopération qui lie le Tchad et le Sénégal dans le transfèrement des témoins, faisant prévaloir que ce transfèrement n’est possible qu’à condition du consentement de la personne extradée et des autorités judiciaires tchadiennes.
L’Etat tchadien fait montre de beaucoup d’atermoiements devant les exigences d’extrader ces potentiels temoins. Est-ce une manière de riposter contre la décision des Chambres africaines qui ont rebouté sa demande de se porter partie civile dans la procédure ?
Rien n’exclut de le penser. L’intention du régime de Debby de se constituer partie civile a manifesté très tôt, dès l’évocation de l’idée de créer un tribunal spécial pour juger Hissène Habré des crimes contre l’humanité. Cette intention a été traduite dans les faits en février dernier auprès des chambres africaines à Dakar, puis en appel en juin dernier. Dans les deux cas, la demande a été rejetée pour non correspondance des infractions visées par la procédure. Le gouvernement se porte victime de pillages économiques dont il accuse le régime Habré, alors que le tribunal est appelé à juger les crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des actes de torture.
Ce double déboutement a soulagé les familles des victimes qui voient mal que l’Etat tchadien, bayeur de fonds et partie prenante dans la mise en place du tribunal chargé à juger Hissène Habré soit en même temps partie civile.