Ordre constitutionnel au Niger : Tandja sous pression

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Il semblerait que la liste des présidents africains en poste « à vie » va en s’allongeant et promet encore moult  rebondissements. Le feuilleton des coups d’Etat militaires et/ou « constitutionnels» sur le continent ne s’apprête pas à prendre fin.

Alors que l’on croyait ces pratiques en voie de disparition, la première décennie du XXIème siècle a semble-t- il remis au gout du jour les « petits arrangements juridiques » dont était friands les présidents de la génération précédente : Eyadéma Gnassingbé,  Omar Bongo Ondimba, Lansana Comté, pour ne citer que les plus proéminents. En effet, que de constitutions amendées in extremis, que de référendums expéditifs et taillés sur mesure n’ont-ils pas été mis en place afin d’assurer aux dirigeants de conserver leur siège. Le Niger, qui semblait jusqu’alors relativement préservé  ne déroge pas à cette fâcheuse tendance et se trouve, lui aussi, sous les feux de la rampe en raison de la modification de la Constitution décidée par le président de la République, Mamadou Tandja, le 4 août, et la tenue des élections législatives le 20 octobre.
En effet, pour se maintenir au pouvoir, le président nigérien Mamadou Tandja, 71 ans, au pouvoir depuis 10 ans, a fait la sourde oreille à tous les appels au retour à la normalité constitutionnelle. Alors qu’il devait se retirer du pouvoir vers la fin 2009 comme le stipule la Constitution nigérienne, le président en a décidé autrement et a méthodiquement organisé son auto-succession. Cet ancien colonel de l’armée  nigérienne a organisé, en dépit des contestations internationales, un scrutin référendaire le 4 août 2009 qui le maintiendrait au pouvoir jusqu'en 2012 au lieu de décembre prochain. Bien décidé à s’offrir une « rallonge » à la tête du pays, il a purement et simplement dissout l’Assemblée Nationale  et la Cour Constitutionnelle qui s'opposaient à son dessein de modifier la Constitution et rester au pouvoir. Cette situation a plongé le Niger dans une véritable crise juridique et politique.
Il faut souligner que la nouvelle Constitution modifiée par le président supprime la limitation à deux mandats présidentiels de cinq ans successifs et renforce les pouvoirs du chef de l'Etat. Ce référendum du 4 août est qualifié aussi bien par l’opposition que par la communauté internationale d’anticonstitutionnel. Il est considéré comme la raison principale de la crise institutionnelle, politique et sociale que traverse actuellement le Niger.
C’est dans ce contexte tendu de crise politique que Niamey a organisé le 20 octobre des législatives controversées et boycottées par l'opposition. Comme réaction immédiate, la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a suspendu le Niger en guise de non reconnaissance de ces élections marquées par l’illégalité constitutionnelle. Cette sanction est révélatrice et devrait se  répercuter négativement sur ce pays et sur les conditions de vie des populations nigériennes qui paieront le prix de l’ambition du Président.
Même son de cloche au niveau de la l'Union Européenne (UE) qui a suspendu son aide au développement au Niger estimée à 458 millions d'euros pour la période 2008-2013. L’UE a donné un mois aux autorités de Niamey pour ouvrir des consultations et engager un dialogue avec l’opposition en vue d'un retour à la normalité constitutionnelle. Il faut rappeler que le référendum du 4 août a valu au Niger la suspension d’une aide budgétaire de 180 millions de l’UE.
Au même titre que la CEDEAO, la Commission Européenne a exprimé sa profonde préoccupation quant à la situation au Niger. Elle a  demandé un retour à l'ordre constitutionnel dans les plus brefs délais. Force est de constater dans ce cadre que la décision du président nigérien de se maintenir au pouvoir au delà de son mandat présidentiel a terni l’image du  pays et a des répercussions économiques que l’on ne peut désormais négliger dans l’analyse de la situation. La situation politique au Niger ne cesse de se détériorer suscitant de grandes inquiétudes quant à l’avenir de ce pays qui risque de sombrer dans la violence et basculer vers l’instabilité. Il est temps que l’ordre constitutionnel soit rétabli et qu’une nouvelle élite politique puisse émerger, malgré les contingences établies par le pouvoir en place.