Malgré les protestations des hauts responsables maliens, la France a décidé de « déconseiller formellement » à ses ressortissants de se rendre au Mali pour assister au très couru « festival du désert », organisé chaque année à Essakane, une petite localité située à proximité de Tombouctou.
Moins de trois mois après l’enlèvement d’un humanitaire français, Pierre Camatte, revendiqué par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), le Quai d’Orsay a semble-t-il cédé aux arguments des analystes de la DGSE qui lui auraient fait part de leur « vive préoccupation » quant à la situation sécuritaire sur la zone. Des éléments d’informations faisant état de menaces probables auraient en effet été jugés suffisamment crédibles par les services de renseignement français pour qu’ils fassent pression sur le cabinet de Bernard Kouchner, qui aurait à contrecœur, demandé à ce qu’une note soit diffusée sur le site Internet du ministère. Cette dernière stipule que "en raison d’un risque sérieux d’enlèvement de ressortissants occidentaux et en application de la consigne générale d’éviter la région, la participation à l'ensemble des festivités prévues au mois de janvier au nord Mali, dont le coup d’envoi est le festival d’Essakane, région de Tombouctou, du 7 au 9 janvier, est formellement déconseillée". C’est un véritable coup de massue pour une économie locale très dépendante de cet évènement, surtout que les autorités maliennes avaient décidé cette année de rapprocher le lieu du festival de la ville de Tombouctou pour réunir des conditions de sécurité qu’ils jugent être « optimales ». Entré dans une colère homérique lorsqu’il a été tenu au courant du changement de recommandation du ministère français des affaires étrangères, le Président Amadou Toumani Touré a contacté au téléphone Abdoulaye Wade, le « doyen » de la sous région depuis la disparition d’Omar Bongo, pour lui demander d’intervenir auprès de Bernard Kouchner. Le président sénégalais, qui ne souhaitait pas intervenir auprès de Paris, lui a fait une proposition inédite, lui envoyer son ministre d'Etat, ministre de la Coopération internationale, de l'Aménagement du territoire, des Transports aériens et des Infrastructures, son fils Karim Wade, comme « invité d’honneur » du festival. Wade père, en fin tacticien, veut ainsi faire d’une pierre deux coups, permettre à son dauphin présumé de se donner une stature internationale, et permettre au Président Touré de ne pas perdre la face. Wade a également recommandé à ATT de faire tourner les médias officiels à plein régime afin qu’ils relaient des images d’étrangers se rendant au festival malgré la recommandation française. Néanmoins, cette opération communication de la présidence malienne ne fera pas oublier qu’un autre évènement d’une toute autre portée symbolique devait être organisé cette année , et a finalement été reporté à l’année prochaine : le millénaire de Tombouctou…