Alors que le paysage du narcotrafic au sud du Sahel est en pleine reconfiguration suite à la crise ivoirienne et aux troubles récents dans les pays de la sous-région, un dossier plus ancien refait surface avec l’ouverture du procès
de Kpatcha Gnassingbé, frère du Président togolais Faure Gnassingbé. En Novembre 2009, « Sahel Intelligence » annonçait en exclusivité que la DEA américaine s’intéressait de près au dossier Kpatcha Gnassingbé, en raison notamment de son implication présumée dans une filière internationale à laquelle il aurait offert sa protection alors qu’il officiait en tant que ministre de la défense. Or, bien que l’acte d’accusation présenté devant les cours togolaises porte sur l’ « atteinte à la sûreté de l’Etat », et ne mentionne pas les activités présumées liées au narcotrafic de Kpatcha, des sources bien informées à Washington nous font savoir que les américains envisageraient de réactiver le dossier en possession de l’agence fédérale anti drogue DEA, afin de profiter du procès pour communiquer autour de leur détermination à lutter contre le narcotrafic. Toujours selon la même source, l’on apprend que Kpatcha Gnassingbé se serait rendu courant 2007 dans l’archipel des Bijagos en Guinée Bissau, où il aurait rencontré plusieurs pontes du trafic de cocaïne latino américain qui lui ont été présentés par l’un de ses hommes de main, un homme d’affaires d’origine soudanaise proche de Bassam El Najjar, un capitaine d’industrie libanais opérant au Togo disposant d’un passeport diplomatique bissau-guinéen. Lors de cette réunion, Kpatcha aurait négocié avec les narcotrafiquants les tarifs du « droit de transbordement » au large de la baie de Lomé, leur assurant que l’armée pourrait garantir la sécurité de la marchandise. Etant donné la configuration du trafic, Lomé constituait pour les barons de la drogue une porte d’entrée idéale pour accéder aux marchés locaux lucratifs d’Accra ou de Cotonou, ainsi que de l’est du Nigéria, difficilement accessible à travers la Guinée-Bissau, qui elle, reste le passage obligé pour atteindre l’eldorado européen ou les marchés du Maghreb, eux aussi en forte expansion. Pour l’oncle Sam, sécuriser le golfe de guinée en termes de lutte contre le narcotrafic est devenue un priorité absolue depuis plusieurs années et les autorités américaines ont déployé pour ce faire une action d’envergure à laquelle participent quasiment tous les services fédéraux US habilités à opérer à l’étranger, ainsi que les services de renseignement, en tête la CIA.