Avec la reprise des violences interreligieuses au Nigéria qui auraient fait près d’une centaine de morts en quelques jours, l’on voit réapparaître le spectre de l’embrasement de ce vaste pays, où la violence est devenue systémique pour une conjonction de raisons. C’est sans conteste d’un point de vue sécuritaire-pour le pays ainsi que pour la région toute entière-que le danger est devenu le plus important, car les nouveaux radicaux islamistes nigérians ont désormais une bannière sous laquelle ils peuvent se rallier pour assouvir leur « désir de Jihad » : Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI). En effet, les extrémismes religieux au Nigéria sont pris dans un étau.
D’un côté, l’on trouve des milices chiites, financées et soutenues par l’Iran, cette dernière souhaitant occuper une position stratégique en Afrique pour barrer la route aux intérêts américains tout en se ménageant un levier de négociation. De l’autre, la montée du Salafisme, du Takfirisme et du Djihadisme, via la franchise locale d’Al Quaïda, constitue une nouvelle « zone d’attractivité idéologique » pour une jeunesse nigériane désabusée et en mal de projet d’avenir, renvoyant dos à dos tous les politiciens locaux et les régimes qui se sont succédés à Lagos, réputés corrompus et jugés incapables de mener le pays vers le train de réforme indispensable à son développement. Pourtant, le Nigéria pourrait être un pays riche, si la répartition de la manne pétrolière n’avait souffert de « prélèvements à la source » depuis plusieurs décennies, empêchant l’Etat d’utiliser ces ressources afin d’investir dans les infrastructures. Les différents dirigeants qui se sont succédés à al tête de l‘état sont en effet prisonniers d’un système où les prébendes distribués à la nomenklatura politique sont les seuls garants de la pérennité d’un système autocratique qui est désormais au bord du basculement, devenant probablement l’un des principaux pourvoyeurs de terroristes pour AQMI, juste derrière l’Algérie et la Mauritanie. Ceci constituerait sans doute la plus mauvaise nouvelle pour les pays sahéliens, car en devenant un réservoir potentiel de recrutement pour AQMI, le Nigéria serait confronté au risque de devenir une base arrière pour certaines Katibas du mouvement terroriste, ce qui positionnerait le centre de gravité d’AQMI beaucoup plus bas, c’ets à dire dans des zones où il serait encore plus difficile d’identifier leurs positions.