Le démantèlement par les forces de sécurité marocaines d’une cellule présumée d’Al Quaïda au Maghreb Islamique (AQMI) à Amgala- à près de 200 kilomètres au sud d’El Ayoun, au Sahara Occidental – confirme les thèses avancées ces derniers mois par les experts en anti-terrorisme, à savoir qu’AQMI est en train de se reconfigurer, envisageant d’ouvrir de nouveaux fronts au nord-ouest. Il ya près de trois mois, les violents affrontements avec les forces de sécurité mauritaniennes ainsi qu’avec l’armée malienne préfigurait l’ouverture de ce nouvel axe à la lisière du Sahara Occidental.
Selon un communiqué des autorités marocaines, trois caches d’armes auraient été découvertes, et vingt-sept personnes interpellées, dont un citoyen marocain membre d’AQMI. Toujours selon Rabat, le réseau démantelé projetait de commettre des attentats terroristes au moyen de Kamikazes visant des lieux de pouvoirs du Royaume Chérifien, ce qui renseigne également sur un probable glissement tactique d’AQMI. En effet, depuis près de trois ans, le centre de gravité des actes d’AQMI s’était plutôt déplacé au sud et dans les confins sahélo-saharien, qui offrent de multiples possibilités en termes de base logistique et de refuges potentiels. En voulant s’attaquer au Maroc, il est plus que probable que les capacités logistiques et techniques d’AQMI se soient considérablement accrues du fait de la source de revenus constituées des rançons perçues pour la libération de plusieurs otages occidentaux, dont trois humanitaires espagnols relâchés cet été. Autre piste possible, il se pourrait que cette Katiba d’AQMI démantelée aie été envoyée comme mesure « punitive » par la branche d’AQMI proche du Front Polisario, cette dernière ayant vu plusieurs de ses chefs arrêtés le mois dernier, ce qui a eu pour effet d’affaiblir le mouvement indépendantiste Sahraoui, l’obligeant à publier de nombreux démentis sur ses liens présumés avec AQMI. En tout état de cause, l’arrivée d’AQMI aux portes du Sahara Occidental remet sur la table la question de la coopération sécuritaire entre les pays du Maghreb et ceux du Sahel, et pose avec acuité la question de la place qui doit être réservée au Royaume Chérifien dans ce dispositif. Enfin, le redéploiement d’AQMI conforte les thèses américaines sur l’impossibilité pour la région d’avoir des « failed states » (états très faibles, à l’image de la Guinée Bissau), ainsi que le besoin de lutter plus efficacement contre les sources de financement d’AQMI.