Le ministre français des Affaires étrangères a surpris son auditoire durant une conférence de presse le 23 octobre dernier en qualifiant les djihadistes qui contrôlent le Nord du Mali de «narcotrafiquants». Un qualificatif que plusieurs experts jugent pourtant parfaitement adéquat.
En l’espace de quelques années, les narcotrafiquants sud-américains se sont en partie détournés de leur route traditionnelle à travers les Caraïbes et les Açores, en faveur de l’Afrique de l’Ouest pour acheminer leur marchandise à destination de l’Europe. L’on estime aujourd’hui que ce nouvel itinéraire sert de transit à 50, voire 70 tonnes sur les 200 à 250 tonnes de cocaïne produite dans les Andes pour le Vieux Continent. Le trafic est, depuis longtemps déjà, favorisé par le faible contrôle de leur territoire par plusieurs Etats de la région, quand ils ne prenaient pas tout bonnement part au trafic, de manière active ou passive. La Guinée-Bissau, la Guinée-Conakry et le Nigeria sont les pays les plus pointés du doigt par l’UNODC (Organisation des Nations Unies contre la Drogue et le Crime). Le trafic s’est intensifié avec la partition du Mali. Aujourd’hui, les nouveaux maîtres du Nord du pays se distinguent dans le trafic de drogue mais à des niveaux divers. Selon Jean-Bernard Véron, le responsable de la Cellule de prévention des crises et de sortie de conflit à l’Agence Française de Développement, Ansar Dine serait le moins impliqué. Ce groupe islamiste tirerait l’essentiel de son financement d’ONG et de donateurs particuliers du Golfe. C’est une toute autre histoire pour le MUJAO et AQMI qui se financent principalement grâce à la drogue et à la prise d’otages.
Mais leur implication dans le trafic de drogue se limiterait à des taxes de passage, voire une protection monnayée des convois. Et cela sans qu’aucun pays d’Afrique du Nord, du Maroc à l’Egypte, ne parvienne à empêcher cette marchandise de parvenir à sa destination européenne.