Un doctorant français, engagé dans des recherches sociologiques en Tunisie, est détenu depuis le 19 octobre sur ordre de la justice militaire, a indiqué jeudi le directeur de son laboratoire à l’Université Aix-Marseille.
Vincent Geisser, directeur de l’Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans (Iremam), a exprimé sa préoccupation en soulignant que « c’est totalement exceptionnel qu’un jeune chercheur français soit présenté devant la justice militaire », qui traite habituellement des atteintes à la sûreté de l’État.
Victor Dupont, âgé de 27 ans, étudie la trajectoire socioprofessionnelle des personnes impliquées lors de la Révolution de 2011, qui a marqué le début du Printemps arabe en Tunisie et mis fin au régime de Ben Ali.
Geisser a précisé que « ce n’est pas un sujet politique lié aux dissidents ou à la sécurité, mais un sujet sociologique classique », plaidant ainsi pour sa libération.
Rattaché au Conseil européen de la recherche (ERC), qui finance des projets scientifiques d’excellence, Dupont était arrivé en Tunisie une dizaine de jours avant son arrestation pour réaliser des entretiens. Selon M. Geisser, il a été arrêté le 19 octobre par la police, placé en garde à vue, puis déféré devant la justice militaire le même jour. Une de ses amies franco-tunisienne a également été arrêtée plus tard et placée sous mandat de dépôt.
Kaïs Saïed, président de la Tunisie, est souvent critiqué pour sa gestion autoritaire du pouvoir et son éloignement des principes démocratiques qui avaient émergé avec la Révolution de 2011. Depuis son élection, il a concentré les pouvoirs exécutif et législatif, suscitant des inquiétudes quant à la séparation des pouvoirs et à l’État de droit.
Saïed est également accusé de restreindre les libertés publiques et de mener une répression ciblée contre les opposants politiques, les journalistes et les voix critiques. Cette dérive autoritaire a engendré un climat de peur et d’autocensure au sein de la société civile, alors que les attentes initiales de démocratie et de justice sociale restent largement insatisfaites.
Les critiques soulignent que son approche politique semble davantage axée sur le maintien du pouvoir que sur la recherche de solutions aux défis pressants du pays.
Ainsi, alors que Kaïs Saïed avait suscité l’espoir de réformes profondes, sa gouvernance actuelle soulève des inquiétudes sur l’avenir démocratique de la Tunisie.