La visite à la fin du mois dernier du président nigérian Muhammadu Buhari à Yaoundé a posé les bases d’une coopération accrue avec le Cameroun dans la lutte contre Boko Haram. Le président nigérian a pris soin de faire table rase des différends passés pour une collaboration optimale.
Le chef d’Etat nigérian avait amené avec lui six gouverneurs d’Etats nigérians frontaliers avec le Cameroun. Cette attention avait pour but de formaliser les échanges entre ces élus locaux qui ont pris l’habitude de travailler de manière informelle avec leurs alter egos camerounais, avec des résultats encourageants, pour pallier à l’absence de coopération au plus haut niveau. Le contexte de cette visite était assez délicat. Elle est intervenue quatre mois après l’élection de Muhammadu Buhari et quelques jours après des attentats suicides dans l’extrême nord camerounais. Ce temps considérable pris par le président nigérian est d’autant plus surprenant que le Cameroun est le plus important de tous les pays voisins du Nigeria, tant sur le plan économique que sur le plan démographique, et que le pays est déjà très mobilisé contre Boko Haram contre qui il a déployé 8 500 hommes pour défendre ses frontières dans le nord.
L’urgence sécuritaire a contraint le président nigérian à occulter les différends du passé. Muhammadu Buhari a ainsi rassuré ses hôtes en affirmant que le Nigeria se conformera à la décision de la Cour internationale de justice de La Haye, dont un arrêt de 2002 a tranché en faveur de la rétrocession au Cameroun de la presqu’île de Bakassi alors occupée par des militaires nigérians. Cette décision est une concession de taille quand on sait que Muhammadu Buhari, alors opposant, s’était insurgé contre Olesegun Obasanjo lorsque ce dernier s’était dit prêt à concéder la rétrocession de la péninsule. Le Cameroun et le Nigéria ont même déterré un projet de 1968 sur la libre circulation des personnes et des biens. Un comité consulaire se tiendra dans la capitale nigériane d’ici la fin du mois pour en fixer les modalités.