A l’heure où le monde arabe est en ébullition, le réseau Al Qaïda au Maghreb Islamique observe un silence radio inquiétant. Les émir Djihadistes auraient-ils décidé qu’il est « urgent d’attendre » et de rester dans l’ombre en attendant de mieux voir où vont conduire les révoltes arabes ?.
Au contraire, sont-ils en train de préparer un « grand coup », en profitant de la confusion qui règne et de l’attention qui se focalise sur le monde arabe et le Japon frappé par la plus grande catastrophe de son histoire récente? Parmi les experts en sécurité et en lutte anti-terroriste, l’hypothèse du « big one », de l’attaque terroriste d’envergure ou de l’opération psychologique de grande ampleur commence à gagner du terrain, tant cette période d’inactivité, voir de latence, ne présage rien de bon.
Tacticiens, rompus à la gestion de leurs efforts, les émirs d’AQMI Mokhtar Belmokhtar et Abdelhamid Abou Zaid, disséminés dans le sahel avec leurs Katibas doivent probablement mettre à profit le « printemps arabe » pour reconstituer leurs forces, voire acquérir des matériels technologiques à haute valeur ajoutée obtenus à la faveur de la déstabilisation des régimes despotiques. En effet, et ceci est un mécanisme connu que l’on a pu observer lors de la chute de l’URSS, le « black market sécuritaro-technologique» doit être en train de battre son plein, notamment au sud de la Lybie.
Riche grâce aux rançons obtenues en échange des otages occidentaux, AQMI doit être en train de faire sa mise à niveau en matériel et en hommes. En effet, le mutisme d’Al Qaïda et sa branche au Maghreb ne rassure pas les services de renseignements des grandes puissances occidentales.
Les spécialistes des questions du terrorisme les plus avertis ne parviennent pas à décortiquer cette énigme. Puisque même les propos provocateurs du dirigeant libyen le colonel Mouammar Kadhafi qui a vertement accusé Ben Laden et Al-Qaïda de souffler le chaud sur son pays en manipulant les jeunes Libyens à l’aide de « pilules hallucinogènes » n’ont pas fait sortir AQMI de son mutisme. Pourtant, la franchise régionale d’Al Quaïda a toujours appelé au renversement des régimes arabes « despotes et apostats » pour établir un état régi par la chariaa islamique. La partition du Soudan, où Oussama Ben Laden avait fait son baptême du feu avant de se replier en Afghanistan, n’a pas non plus fait réagir Al Qaïda. Ce qui est sûr c’est que cette attitude a rendu nerveux les agents du renseignement américain. Des inquiétudes confirmées il y a à peine dix jours par le coordonnateur de la lutte antiterroriste au département d’Etat, Daniel Benjamin. « Avec nombre de nos partenaires, nous avons affirmé notre détermination à faire en sorte que les terroristes ne puissent pas abuser de cette période », a assuré le haut responsable américain qui était le 4 mars à Alger. Les frontières sud de plusieurs pays de la région « qui est en plein remous, se trouvent dans le Sahel et bien sûr nous avons quelque inquiétude que les terroristes n’en profitent pour l’exploiter », a déclaré Benjamin. Le Département d’Etat a renouvelé sur son site web sa mise en garde aux ressortissants américains se trouvant en Mauritanie. Il les a appelés à une « extrême prudence » face aux « activités grandissantes » d’AQMI, sans préciser la nature de cet « agrandissement » d’activités. Si AQMI brille actuellement par son absence sur le terrain, elle est par contre, fort présente dans l’esprit des agents occidentaux qui craignent une attaque surprise.