Le régime militaire algérien semble de plus en plus obsédé par la gestion de l’image du pays et la préservation de son intégrité, au point de prendre des mesures drastiques contre ceux qu’il considère comme des ennemis de l’Etat.
L’affaire de l’arrestation de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, survenue le 16 novembre 2024, à l’aéroport d’Alger, en provenance de Paris, en est un exemple frappant. Cet événement a révélé non seulement la paranoïa du pouvoir en place, mais aussi la tension croissante entre l’Algérie et la France, ainsi qu’entre les pays du Maghreb, sur la question du Sahara occidental.
L’auteur de « 2084 : la fin du monde », est accusé d’« atteinte à l’intégrité du territoire national », une infraction lourdement sanctionnée par la législation algérienne. Sansal, qui s’est fait connaître pour ses positions critiques à l’égard de certains aspects de la politique algérienne, se voit placé en détention à l’aéroport avant d’être transféré, pour des raisons de santé, dans une unité spéciale de l’hôpital Mustapha Pacha à Alger.
Pour la première fois de manière publique et officielle, le président Abdelmadjid Tebboune, sous la pression du général Saïd Chengriha, a réagi à cette arrestation en qualifiant l’écrivain d’« imposteur », affirmant que ce dernier était envoyé par la France, accusée d’ingérence dans les affaires internes de l’Algérie.
Le régime algérien du général Saïd Chengriha, semble voir dans les déclarations de Sansal à l’hebdomadaire français Frontières, une menace à l’unité du pays. Dans cet entretien, l’écrivain a évoqué la question sensible du territoire algérien et du Sahara occidental, soutenant une vision qui, selon Alger, aligne le discours de Sansal sur les revendications marocaines.
La loi algérienne, en particulier l’article 87 bis du code pénal, qui punit de manière sévère toute atteinte à l’intégrité du territoire national ou à la stabilité des institutions, est utilisée par le régime comme un moyen de réprimer les voix dissidentes, qu’elles viennent de l’intérieur du pays ou de la diaspora. Cette logique répressive a conduit à une escalade des tensions internes, renforcée par des lois de plus en plus restrictives.
Le 25 décembre 2024, Tebboune a annoncé des mesures de grâce présidentielle pour plusieurs centaines de détenus. Si cette annonce a été interprétée par certains comme un geste d’apaisement, elle pourrait aussi être vue comme une tentative de décompresser les prisons algériennes, alors que de nouvelles arrestations de dissidents se multiplient.
La paranoïa du régime militaire, qui semble se percevoir en permanence sous la menace d’une révolte ou d’une ingérence étrangère, nourrit une politique de répression qui touche non seulement les opposants politiques, mais aussi les intellectuels et les artistes.
Selon les analystes occidentaux, les mois à venir pourraient être déterminants pour l’avenir du régime, alors que l’Algérie semble se retrouver à un carrefour, tiraillée entre une volonté de réaffirmer son autorité et une pression croissante, tant interne qu’internationale, pour plus de liberté et de réformes.