L’Assemblée nationale tchadienne a massivement approuvé une série de révisions constitutionnelles qui renforcent considérablement les pouvoirs du président, suscitant des inquiétudes quant à un recul démocratique et à la stabilité politique à long terme dans la région.
Les amendements — adoptés par 171 voix pour, une abstention et aucune voix contre — prolongent la durée du mandat présidentiel de cinq à sept ans et suppriment toutes les limites de mandats, permettant ainsi au président Mahamat Idriss Déby de potentiellement rester au pouvoir indéfiniment. Les modifications seront soumises au Sénat pour approbation finale le 13 octobre, après quoi elles seront promulguées.
Le président Déby est arrivé au pouvoir en 2021 à la suite de la mort de son père, Idriss Déby, tombé au combat après avoir dirigé le Tchad pendant trois décennies. Après trois années de direction militaire, Mahamat Déby a revendiqué la victoire lors d’une élection contestée en mai 2024. Son parti a ensuite obtenu la majorité parlementaire en décembre.
Les détracteurs estiment que ces réformes constituent une consolidation du pouvoir par l’élite au pouvoir. « Il y a de moins en moins de voix dissidentes », affirme Remadji Hoinathy de l’Institut d’Études de Sécurité, spécialisé sur l’Afrique. « Cela ouvre clairement la possibilité pour le président et son parti d’établir un bastion durable du pouvoir. »
Les amendements introduisent également un poste de vice-Premier ministre, allongent la durée des mandats parlementaires, et lèvent l’immunité judiciaire pour les responsables poursuivis pour crimes financiers.
Des analystes tel Thomas Mandrup de l’Université de Stellenbosch et du Collège royal de défense du Danemark avertissent que le système politique tchadien « s’éloigne de tout ordre démocratique », le Parlement jouant un rôle de simple « chambre d’enregistrement ».
Ce tournant au Tchad intervient dans un contexte de pauvreté croissante et d’instabilité, avec des effets potentiels en cascade à travers la région du Sahel.
« Pour les défenseurs de la démocratie, les experts en gouvernance, les organisations régionales et les partenaires étrangers, l’enjeu sera désormais de structurer des réponses concrètes — pas seulement des critiques — mais un soutien tangible aux institutions résilientes, à la liberté d’expression, à la transparence et à la légitimité », estime Joshua Muhammed analyste d’ « African Leadership Magazine ».
