Le constat serait sans appel, l’on assiste depuis plusieurs semaines à une intensification de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition dans l’est du Sahel. La sonnette d’alarme a été tirée en fin de semaine dernière par plusieurs ONG, dont Action contre la faim, Oxfam, et le comité international de la croix rouge, qui annonçait le 6 avril le triplement de son aide au Niger et au Mali.
C’est apparemment le taux d’absentéisme dans les écoles qui aura été le premier révélateur des prémisses d’une grave crise alimentaire, et qui aura permis le déclenchement de mesures d’urgence, notamment en faveur du Mali, où le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) veut débloquer en catastrophe 190 millions de Dollars. Malheureusement, il semblerait que le financement -en ces temps de sortie de crise financière internationale- ne soit pas à la hauteur, et OCHA déplorait le 10 avril dans un communiqué que « 57 millions de dollars ont été promis ou reçus et ce sont donc 133 millions de dollars qui restent à trouver pour répondre à ce double défi alimentaire ». Les raisons profondes de la résurgence de cirse alimentaires depuis quelques années sont multiples. En premier lieu, l’impossibilité pour certains pays de mettre en place des organes centraux forts, ainsi qu’une armée de métier ou tout simplement de institutions pérennes, accentue les situations difficiles en temps de crise de part l’impossibilité de mobiliser hommes et matériels pour distribuer des denrées alimentaires. A ce déficit structurel des « Weak states », s’ajoutent les agendas stratégiques des grandes puissances régionales, qui veulent assoir leur stratégie de puissance ou étendre leur influence en soutenant des mouvements de rébellion ou en abritant et finançant-souvent discrètement- les opposants des régimes qui leur posent problème. De surcroit, la situation devenant de plus en plus brouillée avec l’entrée de nouveaux acteurs qui n’étaient pas attendus dans la région, et qui commencent à avoir un impact considérable. Ainsi, le Qatar a entamé depuis près de cinq années une politique diplomatique très agressive en Afrique, et a démarré son positionnement par la Mauritanie, où il entretient de liens très étroits avec certains dirigeants. L’Iran, menacée de mesures « punitives » de la part des puissances occidentales, veut également étendre son influence et ouvre un nouveau front en Afrique, en finançant notamment de milices chiites au Nigéria, mais également en construisant plusieurs universités dans le golfe de Guinée. Ceci n’est que très modérément du gout des anciennes puissances continentales, au premier rang desquels se trouve la Jamahiriya Libyenne, qui continue à avoir un réseau de renseignement très étendu, ce qui lui permet de suivre avec précision les mouvements stratégiques de ces nouveaux entrants. Tous ces éléments combinés concourent à dégrader la situation alimentaire, notamment à l’est du Sahel, qui reste une zone propice aux affrontements interétatiques et à la prolifération du banditisme.