RDC : Procès de 84 soldats congolais accusés de crimes de guerre dans le Sud-Kivu

Un tribunal militaire de Bukavu, capitale de la province du Sud-Kivu en République Démocratique du Congo (RDC), a entamé lundi le procès de 84 soldats de diverses unités de l’armée congolaise, accusés de meurtre, vol, rébellion et d’autres crimes. Ces soldats sont poursuivis pour des faits commis alors qu’ils fuyaient l’avancée du groupe rebelle Mouvement du 23 mars (M23). Selon les médias locaux, pendant plusieurs jours, ces militaires auraient tué au moins neuf civils dans la région de Kabare, provoquant la panique parmi la population déjà effrayée par les avancées des rebelles.

Les soldats ont été arrêtés au nord de Bukavu, où ils ont également commis des abus contre les civils. Des témoignages font état de cas de torture, de pillages, de vol et de viol dans plusieurs villages de Kabare. Le major Nestor Mavulisa, porte-parole de la troisième division de défense, a déclaré que ces soldats, désormais en détention, seraient jugés et publiquement punis pour donner l’exemple. Il a insisté sur l’importance de la discipline au sein des forces armées congolaises : « Il n’y a plus de place pour l’indiscipline dans nos armées. Ceux qui enfreignent les règles, où qu’elles soient, seront punis et traduits en justice. Sans discipline, nous n’aurons pas d’armée », a-t-il affirmé.

Les crimes sont survenus alors que les soldats fuyaient l’avancée du M23 dans le Sud-Kivu, dans un contexte de guerre qui s’est intensifiée ces dernières semaines, après la prise de la ville de Goma, capitale du Nord-Kivu, par les rebelles le 27 janvier. Entre le 26 et le 30 janvier, des affrontements violents ont opposé l’armée congolaise au M23 à Goma et dans ses environs, faisant au moins 3 000 morts et 2 900 blessés. Depuis le début de l’année 2025, les violences ont entraîné le déplacement forcé de 700 000 personnes, portant à 6,7 millions le nombre total de civils déplacés.

Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a approuvé vendredi dernier la création d’une commission indépendante pour enquêter sur les crimes commis au Nord et au Sud-Kivu. Cette commission aura pour mission de rassembler les preuves des atrocités, y compris celles visant spécifiquement les femmes et les enfants, souvent victimes de violences sexuelles, d’esclavage sexuel et de recrutement forcé.

La prise de Goma par le M23, groupe composé en grande partie de Tutsis ayant survécu au génocide rwandais de 1994, a exacerbé les tensions avec le Rwanda voisin. Le gouvernement congolais accuse Kigali de soutenir le M23, accusation confirmée par l’ONU. De son côté, le Rwanda et le M23 dénoncent une coopération entre l’armée congolaise et les Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR), un groupe formé par des responsables du génocide et des Rwandais en exil. Cette collaboration a également été corroborée par l’ONU.

Le M23 a repris ses activités armées en novembre 2021, menant des attaques éclairs contre l’armée congolaise dans le Nord-Kivu. Depuis, il a progressé sur plusieurs fronts, atteignant Goma, capitale de la province et ville d’environ deux millions d’habitants, où sont basées des ONG internationales et des institutions de l’ONU. Depuis 1998, l’est de la RDC est le théâtre d’un conflit majeur alimenté par les milices rebelles et l’armée, malgré la présence de la mission de maintien de la paix de l’ONU (Monusco).

Lors d’un sommet conjoint à Dar es Salam, en Tanzanie, les dirigeants de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe (SADC) ont appelé, samedi, à la mise en place d’un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel dans un délai de cinq jours. Ce sommet a été convoqué suite à la prise de Goma par les rebelles du M23.