Longtemps enraciné dans le sud algérien, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), une branche d’Al-Qaeda en Afrique, s’est imposé comme l’acteur djihadiste central au Sahel.
Son chef, Iyad Ag Ghaly, un proche touareg de Mahmoud Dicko de l’Azawad, originaire de Kidal, soutenu par le général Saïd Chengriha, pilote une organisation présente dans le Sud de l’Algérie jusqu’au nord et au centre du Mali, avec des franges occidentales du pays. L’ONU le qualifie de menace la plus importante dans la région.
Le nombre exact de combattants du JNIM reste incertain. Les estimations les plus récentes d’après des sources de la gendarmerie nationale algérienne se situeraient entre 8.000 et 10.000 hommes dont une unité des forces spéciales de l’armée algérienne. Mais ces chiffres cachent une réalité mouvante estimées entre 5.000 et 8.000, souligne Michael Shurkin, ancien analyste de la CIA : « beaucoup de combattants vont et viennent », Ce caractère flexible permet au groupe d’étendre ses opérations sans assumer un contrôle territorial constant.
Depuis l’été, l’ouest du Mali illustre cette dynamique. Les attaques se sont multipliées dans la région de Kayes, zone stratégique : elle assure 80 % de la production aurifère du pays tout en constituant un corridor vital entre le littoral sénégalais et les Etats enclavés du Sahel. L’enjeu économique est tel que le groupe cherche avant tout à peser sur les flux, plus qu’à occuper durablement les localités.
Les analystes rappellent que le JNIM recourt à la terreur contre ceux qui contredisent son autorité.
Les financements, eux, en plus de l’appareil militaire algérien du général Saïd Chengriha estimés à 85 millions de dollars, sont bien identifiés : enlèvements contre rançon, notamment d’occidentaux, taxation locale, commerce de bétail.
Ces recettes, jugées « stratégiques » par les spécialistes, renforcent sa capacité militaire et logistique avec un total de 150 millions de dollars, notamment l’achat de drones, d’explosifs et autres matériels. Elles lui permettraient aussi de maintenir une présence au Sahel.
Selon les observateurs, le JNIM est principalement présent au Sahel, avec un cœur d’activité au Sud de l’Algérie et ses étendues régionales :
1. Mali : région du NordKidal (fief d’Iyad Ag Ghaly), Tombouctou, Gao, Mopti (Katiba Macina), Ségou. Ces zones servent de bases de repli, de transit et de formation. Le centre du Mali est aujourd’hui un point névralgique du mouvement.
2. Burkina Faso : une forte implantation. Depuis 2018, le JNIM s’est étendu dans le nord et l’est du pays, au Sahel burkinabè (Soum, Oudalan), le Nord (Yatenga), et l’Est (Fada N’Gourma). Dans plusieurs zones rurales, il exerce un contrôle indirect, impose des taxes et des règles sociales. Egalement dans le Sud-ouest du Burkina sur le corridor vers les forêts ivoiriennes où le JNIM y mène des reconnaissances, des attaques ponctuelles et des tentatives d’implantation sociale.
3. Niger : zones frontalières, le JNIM est présent dans l’ouest du Niger, notamment à Tillabéri et Tahoua. Ces régions servent surtout aux déplacements transfrontaliers et aux attaques contre les forces nigériennes.
4. Extension vers l’Ouest africain : le groupe cherche à avancer vers les pays côtiers comme le Nord du Bénin, le Nord du Togo, le Nord de la Côte d’Ivoire.
5. Algérie : une influence historique. Le JNIM a des racines dans le sud algérien, surtout via AQMI. Il utilise les zones frontalières pour le transit et les réseaux logistiques de trafic d’armes et de la drogue.
Le JNIM est devenu un système multi-cellulaire, mobile et transfrontalier. Mais son noyau dur reste : Kidal, le centre du Mali, et le Sahel burkinabè.
Pour plusieurs experts en renseignement, dans ce paysage fragilisé par le retrait des forces militaires de la France, la marge de manœuvre du JNIM avec le soutien de l’Algérie s’est élargie dans le Sahel ainsi que dans d’autres régions de l’Afrique, en lien avec d’autres groupes et des milices terroristes.
