Plusieurs personnes ont été tuées et d’autres blessées le week-end dernier dans des affrontements intercommunautaires entre miliciens à Bria, ville diamantifère de l’est de la Centrafrique ; malgré la présence des forces de la mission des Nations unies en Centrafrique (Minusca).
« Il y a une cinquantaine de morts. Certains corps ont été directement enterrés par les familles, donc il est difficile de donner un chiffre précis », a déclaré mardi à l’AFP le préfet de la Haute Kotto, Evariste Binguinidji, présent sur place.
« Le bilan établi par le préfet me semble crédible », a affirmé le président de la Croix rouge centrafricaine Antoine Mbaobogo. Il a précisé que son organisation avait établi dès lundi un bilan de 35 morts et 17 blessés.
Divers groupes armés et milices d’autodéfense se disputent le contrôle de Bria, cité riche en diamants, depuis que la Séléka, coalition de groupes rebelles, a pris le contrôle de cette partie du pays dès 2012.
Malgré la signature d’un accord de paix entre le gouvernement et 14 groupes armés en février 2019, ces derniers contrôlent encore les deux tiers du territoire national.
Depuis 2013 et le début du conflit, plus du quart des 4,7 millions d’habitants de la Centrafrique ont fui leur domicile.
11.500 déplacés de Bria ont été envoyé vers cinq sites différents, où ils reçoivent de l’aide (abris et nourriture), ont indiqué l’Unicef et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (Ocha).
Les violences entre groupes armés y sont persistantes, mais cette fois l’équation est plus complexe : le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC), l’un des principaux groupes qui contrôlait la ville, s’est scindé ces derniers mois, selon plusieurs sources présentes sur place.
Les membres de l’ethnie rounga, dont est issu le chef militaire du FPRC, Abdoulaye Hissène, et plusieurs de ses officiers, font désormais face à une alliance de deux autres ethnies présentes à Bria, les Goula et les Kara, parfois membres du FPRC.
« L’alliance des Goula et des Kara a conquis presque toute la ville (…) Tous les Rounga ont fui », avait déclaré une source humanitaire contactée par l’AFP dimanche.
En juillet, Kara et Goula avaient signé une alliance contre les Rounga, une ethnie originaire de la région de Ndele, à la frontière du Tchad, et bien implantée dans le commerce régional.
Depuis juillet, des affrontements opposent le FPRC et son ancien allié, le Mouvement des libérateurs centrafricains pour la justice (MLCJ), affilié à l’ethnie kara. La ville voisine de Birao, dans l’extrême-nord du pays, a été ravagée par ce conflit dont l’enjeu est le contrôle de l’axe routier vers le Soudan.
Les tensions couvaient dans la préfecture voisine de Bria, où cohabitent Rounga, Kara, et Goula. Et si les Karas restent très minoritaires dans la ville, les Goula y sont bien implantés.
« Les Goula contrôlent beaucoup de mines autour de Bria », explique un diamantaire centrafricain habitué à travailler dans la région. « Mais en ville, la plupart des bureaux de vente de diamants appartiennent à des Rounga. Ce sont des commerçants qui ont établi des réseaux solides avec des acheteurs étrangers, notamment indiens et des libanais. C’est l’une des principales raisons qui ont conduit à ces tensions » assure-t-il.
Le porte-parole du FPRC, Aboubacar Sidiq, conteste néanmoins toute scission au sein de son mouvement: « C’est une querelle, nous sommes en train d’en chercher les vraies causes » a-t-il indiqué.