Mali : L’Algérie veut-elle s’approprier le nord malien ?

Ce qui se joue aujourd’hui dans le nord du Mali dépasse largement les discours officiels de « médiation » ou de « stabilité régionale » que brandit sans cesse Alger, son ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, Ahmed Attaf, après les attaques du territoire malien.

Le régime militaire algérien mène depuis des années une politique d’ingérence systématique au Sahel, avec un objectif de s’approprier le nord du Mali pour en faire un territoire sous tutelle, un glacis stratégique, une extension officieuse de son propre territoire, selon plusieurs analystes africains et occidentaux.

Derrière les formules diplomatiques, se cache une stratégie d’annexion implicite. L’Algérie, dirigée par une élite militaire opaque et sécuritaire du général Saïd Chengriha, agit en sous-main pour contrôler les groupes armés touaregs, entretenir l’instabilité au nord du Mali, et ainsi affaiblir l’Etat malien.

Cette politique n’a rien d’un soutien aux populations locales : c’est une entreprise froide, calculée, visant à empêcher l’émergence d’un véritable pouvoir malien.

Depuis les années 1990, les services secrets algériens, l’ex DRS et ses avatars actuels, ont infiltré, financé et instrumentalisé des mouvements armés, jihadistes comme indépendantistes. Le nord malien est devenu, pour Alger, un laboratoire de manipulation géopolitique, un outil pour contenir les rébellions touarègues de son propre territoire.

La crainte fondamentale du régime algérien est que les aspirations à l’autodétermination des populations touarègues du Mali ne contaminent les régions sahariennes du sud algérien.

Ces territoires, réprimés, marginalisés et exclus de la richesse pétrolière et gazière du pays, exigent leur autonomie. Alger veut étouffer cette idée en maintenant sous contrôle tout espace qui pourrait servir de modèle ou de base arrière à une telle revendication.

Les réunions secrètes organisées à Alger avec les chefs rebelles, les groupes terroristes islamistes en Afrique, les financements détournés, les protections tacites, tout pointe vers une stratégie de morcellement du Mali.

L’Etat malien, affaibli pendant des années, voit aujourd’hui plus clair dans le jeu de son voisin. L’ex- Premier ministre malien Abdoulaye Maïga a été sans ambiguïté : « Nous n’accepterons plus que des groupes hostiles soient armés, soutenus ou protégés par un État tiers». Et pour cause : le Mali ne tolérera plus que le nord de son territoire serve de monnaie d’échange aux ambitions régionales de l’Algérie.

L’accord d’Alger de 2015, présenté comme une avancée diplomatique, s’est révélé être un piège : un processus vidé de substance, où la médiation algérienne n’était qu’un paravent pour avancer ses pions.

En janvier 2024, le Mali a suspendu sa participation à ce simulacre, dénonçant une médiation partiale et corrompue. La reprise de Kidal par les forces armées maliennes a marqué un tournant : un signal fort à Alger et à tous ceux qui pensaient pouvoir morceler le pays impunément.

Aujourd’hui, l’Algérie tente de recoller les morceaux d’une influence qui s’effrite.

Le Mali, avec son président Assimi Goïta et ses partenaires de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), ainsi que le rapprochement avec de nouveaux alliés, ne compte plus laisser son territoire devenir le terrain de jeu des ambitions du régime militaire algérien pour se maintenir en Algérie.