Sahel : Washington revient par le commerce

Après avoir gelé son aide au développement à la suite des coups d’Etat militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger entre 2020 et 2023, les Etats-Unis opèrent un retour stratégique dans la région. Cette fois, fini l’assistance classique : place au commerce et aux investissements, notamment dans les ressources minières.

« Du commerce, pas de l’aide », a résumé en mai à Abidjan Troy Fitrell, haut responsable du Département d’Etat. Une ligne dictée par l’administration Trump, qui fait de la diplomatie économique un pilier de sa politique africaine. Objectif : sécuriser des partenariats autour de l’or, de l’uranium et surtout du lithium, clé de la transition énergétique mondiale.

Ces dernières semaines, plusieurs émissaires américains ont visité Bamako, Ouagadougou et Niamey. Début juillet, Rudolph Atallah, conseiller à la Maison-Blanche, a proposé au Mali une coopération antiterroriste renforcée, vantant « la solution américaine » face aux groupes affiliés à Al-Qaida et à l’Etat islamique. Peu après, William B. Stevens a évoqué la possibilité d’« investissements privés américains » en parallèle du soutien sécuritaire.

Selon Ulf Laessing, expert à la Fondation Konrad Adenauer, Washington aurait même proposé un appui militaire ciblé contre les chefs jihadistes en échange d’un accès privilégié aux ressources minières. Une offre qui séduit les pouvoirs sahéliens, réunis au sein de l’Alliance des Etats du Sahel (AES).

« Il faut miser sur l’investissement », a insisté en juillet le ministre malien des Affaires étrangères Abdoulaye Diop, saluant une « convergence de vues » avec les Etats-Unis. Le Mali est l’un des principaux producteurs africains d’or et de lithium, le Niger d’uranium, et le Burkina Faso d’or.

Face à l’influence croissante de la Russie et de la Chine, certains responsables américains plaident pour maintenir une présence diplomatique, notamment à Bamako, pour ne pas céder totalement le terrain.

Mais la lutte contre le terrorisme reste la priorité : « Pas de stabilité, pas d’investissement durable », résume Liam Karr, analyste américain. Fin juillet, une délégation militaire burkinabè s’est rendue à Washington. D’autres échanges sont attendus, preuve que la diplomatie économique américaine entend bien s’ancrer au Sahel — sur fond de compétition géopolitique.