Les nouvelles concernant l’écrivain Boualem Sansal, emprisonné depuis trois mois par le régime militaire algérien, sont de plus en plus préoccupantes, a annoncé mardi son éditeur français, Antoine Gallimard, lors d’une soirée de soutien organisée à l’Institut du monde arabe (IMA) à Paris, en partenariat avec les Éditions Gallimard.
« Les dernières informations ne sont pas bonnes. Trois mois, c’est long pour lui », a déclaré Antoine Gallimard. « D’autant plus quand on ignore si cette durée pourrait se prolonger à six mois, voire un an… »
Boualem Sansal, âgé et malade, se trouve actuellement au pavillon pénitentiaire de l’hôpital Mustapha d’Alger, où il est soigné pour une affection grave, a précisé son avocat français, Me François Zimeray. « Je n’ai aucun doute sur le fait qu’il reçoit probablement des soins appropriés, mais il reste un homme fragilisé par cette situation et privé de sa liberté », a ajouté l’avocat.
L’écrivain est poursuivi en vertu de l’article 87 bis du Code pénal algérien, qui punit toute action « terroriste ou subversive » menaçant la sûreté de l’État, l’intégrité du territoire ou la stabilité des institutions.
Selon Le Monde, son arrestation serait liée à ses propos dans un entretien accordé au média français « Frontières », où il aurait soutenu la position du Maroc sur la question de la frontière historique entre les deux pays pendant la colonisation française.
L’incarcération de Sansal a suscité des protestations parmi de nombreux intellectuels et écrivains qui considèrent les accusations portées contre lui comme infondées. Me Zimeray a rappelé que, « au regard des accusations, il est d’abord innocent ».
Des écrivains internationaux se sont joints au soutien de Boualem Sansal, tels que l’Italien Roberto Saviano, l’auteur britannique Ian McEwan ou l’Islandais Jón Kalman Stefánsson. Lors de la soirée, Jack Lang, président de l’IMA, a exprimé son soutien en déclarant : « Ce mot liberté, ma génération l’a appris, cultivé et forgé à travers les combats pour l’indépendance de l’Algérie. » Il a ajouté : « Nous sommes Sansal. Vous êtes Sansal. »
« Cette soirée est pour Boualem, elle n’est pas contre l’Algérie », a souligné le journaliste François Busnel. « On vous demande seulement de ne pas l’oublier dans les prisons d’Alger », a déclaré l’écrivain Franco-Algérien Kamel Daoud, prix Goncourt 2024.
Le journaliste Eric Fottorino a rappelé une déclaration de Boualem Sansal datant de 2015 : « Ils me laissent en liberté parce que je suis leur caution pour qu’ils continuent de penser qu’ils sont une démocratie. »
Le Figaro a également publié une tribune du comité de soutien à l’écrivain, appelant le président Emmanuel Macron à intervenir pour sa libération en utilisant « des leviers diplomatiques ». Parmi les suggestions avancées, il est question de remettre en question les conditions de l’accord sur les visas entre la France et l’Algérie signé en 1968.
L’auteur franco-algérien, détenu par le régime militaire du général Saïd Chengriha, fait face à des conditions de détention sévères, aggravées par sa maladie et son âge avancé.
L’incarcération de Boualem Sansal est perçue comme représailles politiques. Un mois après ses déclarations controversées, son emprisonnement suscite de vives protestations parmi les intellectuels et écrivains, qui réclament sa libération.