En s’enfuyant, les islamistes d’Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) ont laissé derrière eux un document détaillant leur stratégie au Mali. Une précieuse mine d’informations. Signé Abdel Malek Droukdel, le numéro 1 d’AQMI, ce document a été retrouvé dans les décombres d’un local occupé par ces miliciens. En fait, il s’agit d’une lettre adressée aux responsables locaux du mouvement terroriste : dans cette correspondance du mars 2012, leur patron prône une application moins sévère de la Charia : « nous devons prendre en compte l’environnement local qui rejette un islam trop dur », a-t-il écrit. Pour mieux se faire comprendre, le leader d’AQMI a illustré ses propos en évoquant les cas de destruction des mausolées et de lapidation en cas d’adultère. Dans le même ordre d’idée, il s’est opposé au radicalisme islamique dont a fait preuve le Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO) dans la ville de Gao.
Aussi, conseille-t-il de se rapprocher par le biais d’alliances avec les groupes locaux. Une logique qu’il garde en faisant allusion à l’entrée en guerre d’Ansar Dine contre le Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA), une erreur à son avis. Poursuivant ses recommandations, Abdel Malek Droukdel veut d’un AQMI plutôt discret, non sous les feux des projecteurs sur le plan politique et militaire : « un mouvement local avec ses propres causes et ses préoccupations », définit-il dans sa lettre. Et, de renchérir, « nous n’avons aucune raison de mettre en avant notre projet jihadiste et expansionniste ».
Ce document dactylographié en arabe a été rédigé peu avant la prise de Tombouctou, Gao et Kidal, les 3 grandes villes du nord du Mali, par AQMI ainsi que ses partenaires, Ansar Dine et le MUJAO. Des islamologues, dont Mathieu Guidère, ont en certifié l’authenticité.