Selon des sources bien informées, le régime algérien aurait entamé une série de contacts indirects mais soutenus avec Ferhat Mehenni, leader du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie (MAK), aujourd’hui exilé en France. L’objectif de ces échanges : jeter les bases d’un statut d’autonomie pour la région de Kabylie, dans le cadre de la souveraineté de l’État algérien.
Longtemps considéré comme persona non grata par le pouvoir algérien, Ferhat Mehenni voit aujourd’hui sa position évoluer. Selon des sources proches du ministère de la défense et du président Abdelmadjid Tebboune, des intermédiaires non officiels auraient été mandatés pour prendre langue avec lui au cours des derniers mois, dans une tentative de dénouement pacifique de la question kabyle.
Fondateur du MAK en 2001, Mehenni s’est toujours présenté comme un défenseur de l’autodétermination pacifique de la Kabylie. Exilé en France depuis plus de deux décennies, il est à la tête du Gouvernement provisoire kabyle (GPK), dont les activités ont été interdites et qualifiées d’« organisation terroriste » par Alger en 2021. Mais selon un diplomate européen impliqué dans les discussions, « la ligne bouge à Alger. Le pouvoir cherche une issue politique, et cela passe par Ferhat Mehenni, qu’on le veuille ou non ».
Toujours selon les mêmes sources, les discussions porteraient sur la création d’un cadre institutionnel spécifique pour la Kabylie : un Parlement régional, une gouvernance autonome, l’usage officiel de la langue amazighe comme langue principale, et une gestion locale des affaires économiques, notamment en matière de ressources forestières, artisanales et touristiques.
De son côté, Ferhat Mehenni aurait posé plusieurs conditions à toute négociation sérieuse : la levée de l’interdiction du MAK, la libération des prisonniers politiques kabyles, une reconnaissance officielle de l’identité amazighe plurielle, et surtout, une médiation internationale neutre pour encadrer le processus.
« La Kabylie n’a jamais cessé de vouloir vivre libre, mais elle est prête à discuter si l’Algérie accepte de tourner la page du déni et de la répression », aurait déclaré Mehenni lors d’une récente réunion avec des représentants de la diaspora kabyle à Genève.
Ces évolutions interviennent dans un contexte de fragilité politique croissante à Alger. Le pouvoir central, confronté à des défis économiques, sociaux et diplomatiques, cherche à apaiser les tensions internes. Des voix au sein du régime reconnaissent aujourd’hui l’impasse de la stratégie exclusivement sécuritaire menée contre les revendications kabyles.
Un ancien ministre confie que Ferhat Mehenni a été diabolisé pendant des années. Mais face à l’enlisement, certains au sommet de l’État comprennent que le dialogue vaut mieux que la fuite en avant.
Les réactions à ces pourparlers présumés restent contrastées. Si une partie de la société civile salue cette tentative de sortie de crise, certaines élites politiques et militaires voient d’un très mauvais œil toute reconnaissance du MAK ou de son leader.
Ferhat Mehenni, longtemps marginalisé, pourrait ainsi redevenir un acteur central du débat national. L’autonomie de la Kabylie, autrefois taboue, serait désormais au cœur des dynamiques politiques en Algérie.
Kabylie : L’Algérie en pourparlers discrets avec Ferhat Mehenni pour une autonomie de la Kabylie sous souveraineté nationale
