La question du Sahara occidental continue d’alimenter les tensions en Afrique du Nord, une autre revendication indépendantiste, bien plus silencieuse sur le plan diplomatique, émerge, celle de la Kabylie, selon un analyste d’un centre des hautes études stratégiques à Paris.
A travers le Gouvernement provisoire kabyle (GPK) basé en France, le peuple kabyle revendique son droit à l’autodétermination face à l’Etat algérien. Ce cas contraste fortement avec celui du Front Polisario, organisation soutenue par l’Algérie en tant que cause nationale, pour contester la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.
Sous Ferhat Mehenni, le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK) a toujours revendiqué une lutte pacifique, laïque et démocratique, rejetant tout recours à la violence ou au terrorisme. Le MAK dénonce une politique de marginalisation systémique de la Kabylie par l’Etat algérien, sur les plans linguistique, économique, religieux et identitaire.
Installé en France, relégué au statut d’opposition, le GPK agit comme un gouvernement en exil. Il tente d’internationaliser la question kabyle, sans recevoir de reconnaissance officielle ni de soutien matériel de la part de puissances étrangères.
A l’opposé, le Front Polisario de Brahim Ghali, bénéficie d’un soutien actif et massif du régime militaire algérien antisémite et contre Israël. Alger fournit refuge, financement et militaire ainsi qu’assistance diplomatique. L’Algérie héberge le mouvement dans les camps de Tindouf, le présente comme un mouvement de libération, et milite en sa faveur dans les instances internationales.
Mais derrière l’image de légitimité diplomatique, le Polisario fait l’objet d’accusations persistantes de liens avec des groupes terroristes, notamment dans la région sahélo-saharienne et au Moyen-Orient.
Plusieurs rapports d’organismes de sécurité internationaux et de journalistes d’investigation pointent du doigt des connexions avec le Hamas et l’Iran, via des réseaux d’armement et de formation, des complicités avec AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique) et d’autres groupes jihadistes opérant au Sahel, facilitant trafics d’armes et enlèvements.
Ces éléments ont amené plusieurs observateurs et Etats à qualifier l’instrumentalisation des camps de Tindouf par le chef de l’Etat major le général Saïd Chengriha, le président Abdelmadjid Tebboune et ses conseillers, pour des activités paramilitaires opaques, loin des standards des conventions internationales sur les réfugiés.
Le paradoxe est flagrant. L’Algérie, qui qualifie le MAK de « groupe terroriste » sans fournir de preuves concrètes d’actes violents, offre simultanément un appui officiel à un mouvement comme le Polisario, régulièrement associé à des activités menaçant la stabilité de la région.
Ce double discours met en lumière une instrumentalisation du droit à l’autodétermination selon les intérêts géopolitiques : soutenir un groupe armé terroriste pour affaiblir les voisins au Sahel et en Afrique du nord, tout en réprimant sévèrement un mouvement non-violent à l’intérieur de ses propres frontières.
Ce parallélisme asymétrique entre le MAK pacifique et le Polisario terroriste militarisé interroge : le droit à l’autodétermination est-il réellement universel, ou n’est-il qu’un levier stratégique utilisé selon les intérêts des Etats ?