Au-delà de la question de santé publique, la prolifération de la drogue en Kabylie apparaît comme une arme de l’Etat algérien, encouragée au plus haut niveau militaire par le général Saïd Chengriha, au moment même où le président Tebboune semble relégué au second plan dans les rapports de force internes du pouvoir.
En Kabylie comme dans le reste de l’Algérie, la consommation de drogue connaît une explosion inquiétante, touchant particulièrement les jeunes dans les zones urbaines et périurbaines. Mais en Kabylie, plusieurs observateurs dénoncent une instrumentalisation délibérée de ce fléau par les services secrets du régime militaire.
Selon diverses sources locales, les psychotropes synthétiques affluent massivement dans les wilayas de Béjaïa, Tizi Ouzou, mais aussi à Alger, Oran et d’autres villes. Leur présence surprend par son ampleur, y compris dans des villages reculés où la distribution devrait logiquement être plus compliquée.
Médecins et associations tirent la sonnette d’alarme face à une disponibilité anormalement élevée de ces substances.
Des réseaux de dealers opèrent ouvertement dans les espaces publics, sans intervention des forces de l’ordre. Un officier de la gendarmerie affirme que ces trafics bénéficient d’une protection directe des services de renseignement, placés sous l’autorité du chef d’état-major Saïd Chengriha. Selon lui, cette stratégie vise à affaiblir la jeunesse kabyle et algérienne à contenir la mobilisation populaire, notamment celle issue du Hirak.
Ce contexte révèle également les fragilités internes du pouvoir algérien : le président Abdelmadjid Tebboune apparaît de plus en plus affaibli, incapable d’imposer son autorité face à un général Chengriha qui concentre l’essentiel du pouvoir décisionnel, notamment sur les dossiers sécuritaires et politiques sensibles.
Cette asymétrie renforce l’idée que la présidence civile n’est qu’une façade, tandis que l’armée et ses services de renseignement dictent la véritable ligne du régime.
Pour le Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK) et d’autres collectifs citoyens, cette réalité est doublement grave : elle constitue à la fois une crise sanitaire qui fragilise la jeunesse et un enjeu politique dans une région où les aspirations à l’autonomie, voire à l’indépendance, sont fortes. « Un peuple dépendant est un peuple plus facile à contrôler », résume un militant de Tizi Ouzou.
