Les violences anti-« Charlie Hebdo » le mois dernier ont fait éclater au grand jour un clivage sans précédent entre le gouvernement nigérien et l’opposition du pays qui menace d’ébranler un pays à la stabilité déjà précaire.
Les responsables du régime nigérien considèrent officieusement que les leaders de l’opposition étaient à la manœuvre lors des manifestations les 16 et 17 janvier dernier contre les caricatures du journal satirique français « Charlie Hebdo ». Ces manifestations ont fait 10 morts, provoqué l’incendie d’une quarantaine d’églises et de débits de boissons ainsi que des actes de vandalisme contre des bâtiments publics.
C’est pour ce motif que Saoumana Sanda, un responsable de l’opposition a été arrêté le 24 janvier dernier alors qu’il avait été relâché la veille sur un ordre du juge. Mais cette arrestation, qui serait selon les proches du concerné sa cinquième en moins d’un an, illustre une situation qui s’est fortement dégradée dans le pays. Arrestations et interrogatoires des membres de l’opposition sont devenus courants dans le pays depuis quelques mois. Le pouvoir accuse l’opposition de vouloir le renverser dans la rue tandis que l’opposition dénonce la dictature rampante du régime et la dérive d’un chef d’Etat obnubilé par la prochaine élection présidentielle prévue en 2016.
Si les frictions entre pouvoir et opposition sont communes à plusieurs pays du monde, l’ampleur qu’elles prennent au Niger est inquiétante. Ban Ki Moon, Secrétaire général des Nations Unies a exprimé avec regret cette situation, dans son dernier rapport consacré à l’Afrique de l’Ouest, publié fin décembre. La population nigérienne ne se retrouve plus entre un pouvoir critiqué qui n’arrive pas à répondre aux attentes des citoyens et une opposition divisée tentée par l’utilisation des manifs dans la rue. Beaucoup sont tentés par les discours antisystèmes relayés depuis plusieurs décennies par des organisations salafistes qui peuvent menacer le Niger, en plus des activités djihadistes dans la région.