France – Algérie : L’affaire Amir DZ ravive les tensions, Alger prépare des expulsions diplomatiques

La réconciliation entre Paris et Alger semble sérieusement compromise. Une semaine seulement après la visite du ministre français des Affaires étrangères en Algérie, les relations bilatérales sont mises à rude épreuve par la mise en examen d’un agent consulaire algérien en France, soupçonné d’avoir participé à l’enlèvement de l’opposant algérien Amir Boukhors, alias Amir DZ.

Selon le Parquet national antiterroriste (PNAT), trois hommes ont été mis en examen vendredi 12 avril à Paris pour « arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire suivie de libération, en relation avec une entreprise terroriste, ainsi que pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle ». Parmi eux, un agent du consulat algérien à Créteil.

La victime présumée, Amir DZ, est une figure de la contestation anti-régime algérien, très suivie sur les réseaux sociaux (plus d’un million d’abonnés sur TikTok). Réfugié politique en France depuis 2023, il aurait été enlevé le 29 avril 2024 dans le Val-de-Marne avant d’être relâché. Il affirme également avoir été agressé physiquement à deux reprises, en 2022 et en 2024.

Son avocat, Me Éric Plouvier, n’a pas mâché ses mots, parlant d’une « affaire d’État ». « Une puissance étrangère n’a pas hésité à mener une action violente sur le sol français par l’intimidation et la terreur ».

Cette affaire met également en cause un autre diplomate du consulat algérien à Créteil, aujourd’hui introuvable et présumé en fuite en Algérie.

La réaction des autorités algériennes ne s’est pas fait attendre. Samedi soir, le ministère algérien des Affaires étrangères a publié un communiqué cinglant dénonçant « un développement inadmissible et inqualifiable qui causera un grand dommage aux relations algéro-françaises ». L’ambassadeur de France à Alger, Stéphane Romatet, a été convoqué d’urgence pour recevoir « une vive protestation ».

Le ministère algérien a fustigé ce qu’il qualifie de « cabale judiciaire », basée sur de simples indices de téléphonie mobile. « L’argumentaire vermoulu et farfelu des autorités françaises repose sur le seul fait que le téléphone mobile de l’agent consulaire aurait borné autour du domicile de l’énergumène », ironise le communiqué.

Un point de friction important concerne le statut de l’agent algérien incarcéré. Alger revendique son immunité diplomatique, mais côté français, une source proche du dossier affirme que l’intéressé dispose d’un passeport de service, et non d’un passeport diplomatique, ce qui ne le protégerait pas de poursuites pénales.

Selon des informations, les autorités algériennes s’apprêteraient à riposter en expulsant plusieurs diplomates français en poste à Alger. Une liste serait déjà en préparation, en guise de réponse officielle à ce qu’Alger considère comme une humiliation diplomatique.

Cette crise intervient alors que les relations franco-algériennes restent fragiles, ponctuées d’accalmies suivies de brusques retours de tensions, notamment autour de la mémoire coloniale, des questions migratoires, ou encore des réseaux d’opposition exilés en France.

L’affaire Amir DZ marquera-t-elle une nouvelle glaciation durable entre Paris et Alger, ou les canaux diplomatiques réussiront-ils à désamorcer une tension devenue explosive ?