Afrique de l’Ouest : La CEDEAO réoriente sa stratégie face à l’émancipation des Etats du Sahel

Dans un développement majeur pour l’Afrique de l’Ouest, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a amorcé la relocalisation de ses institutions présentes au Mali, au Burkina Faso et au Niger, à la suite du retrait officiel de ces trois pays en début d’année. Ces derniers ont fondé l’Alliance des États du Sahel (AES), marquant ainsi leur volonté d’indépendance politique et stratégique.

Réunie en session extraordinaire à Accra, la CEDEAO a reconnu la portée de cette rupture. Le président du Conseil des ministres de l’organisation, Yusuf Maitama Tuggar, également ministre nigérian des Affaires étrangères, a qualifié la situation de « moment difficile », tout en insistant sur la nécessité d’adaptation. « Nous n’avons jamais souhaité discuter du retrait d’États membres, mais il nous faut désormais avancer et envisager l’avenir avec lucidité », a-t-il affirmé.

Les ministres ont étudié divers scénarios, notamment le redéploiement administratif des programmes et institutions concernés, ainsi que les implications pour la libre circulation des biens et des citoyens au sein de l’espace CEDEAO. Des documents officiels encadrant ces ajustements sur les plans juridique et diplomatique sont attendus prochainement.

De son côté, l’Alliance des Etats du Sahel poursuit son affirmation. A Bamako, la Place de la CEDEAO a été rebaptisée « Place de la Confédération des Etats du Sahel (AES) », tandis qu’un passeport commun à l’AES est en préparation. Ces mesures symboliques, accompagnées de sanctions commerciales et de l’expulsion de représentants de la CEDEAO, témoignent de la volonté des États sahéliens de prendre leurs distances.

Malgré la rupture actuelle, Yusuf Maitama Tuggar demeure optimiste quant à l’avenir de la région. Il rappelle que l’unité ouest-africaine a déjà été mise à l’épreuve par le passé, et qu’elle en est toujours sortie renforcée. A ses yeux, cette nouvelle crise ne fera pas exception.

Alors que la CEDEAO célèbre son cinquantième anniversaire, ce moment charnière pourrait bien marquer un tournant décisif : soit il accentuera les fractures au sein de l’espace régional, soit il servira de point de départ à une nouvelle forme de coopération, plus adaptée aux réalités politiques et sécuritaires de l’Afrique de l’Ouest.