L’Ouganda a porté plainte contre le Kenya devant la Cour de justice de l’Afrique de l’Est, l’organe judiciaire de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), en raison du refus de Nairobi de délivrer une licence à l’État ougandais pour l’importation de pétrole à travers son territoire. La plainte a été déposée le 28 décembre dernier, après que le Parlement ougandais ait approuvé en novembre une loi conférant le monopole de l’importation de pétrole à la compagnie nationale ougandaise du pétrole « UNOC » (Uganda National Oil Company).
Selon le ministère public ougandais, la mise en œuvre de cette loi nécessite le transport de produits pétroliers à travers le Kenya par l’intermédiaire de l’UNOC et de la Kenya Pipeline Company (KPC), la société d’État kényane des oléoducs. Cependant, le ministère public soutient que le ministère de l’Énergie et l’Autorité de régulation du pétrole et de l’énergie (EPRA) du Kenya ont imposé à l’Ouganda, pour l’obtention de la licence, des conditions jugées « non applicables, pratiques ou rationnelles » par l’UNOC.
L’Ouganda estime que le Kenya viole son droit en tant que pays enclavé d’accéder à la mer, un droit reconnu dans le Traité instituant la Communauté d’Afrique de l’Est et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Le président ougandais, Yoweri Museveni, a précédemment accusé les intermédiaires kényans d’être responsables de l’augmentation des prix des carburants dans son pays en novembre dernier, malgré la tendance mondiale à la baisse.
Les médias kényans rapportent que l’Ouganda importe annuellement environ 2,5 milliards de litres de pétrole, d’une valeur d’environ 2 milliards de dollars, avec la KPC gérant au moins 90 % des chargements. Dans le cadre de son ambition de devenir un producteur de pétrole, l’Ouganda a entrepris la construction d’un méga-oléoduc de 1 450 kilomètres depuis l’ouest de son territoire jusqu’au port tanzanien de Tanga, dans l’océan Indien, financé par Total et la China National Offshore Oil Corporation (CNOOC). Ce pipeline devrait devenir le plus long pipeline de pétrole chauffé au monde.
Le projet, incluant des centaines de puits, des centaines de kilomètres de routes, des camps et d’autres infrastructures, a suscité la controverse, des groupes de défense des droits de l’homme et des écologistes dénonçant le fait que le pipeline traversera des espaces naturels protégés, entraînant la perte de terres et de foyers pour plus de 100 000 personnes en Ouganda et en Tanzanie. En octobre dernier, la ministre ougandaise de l’Énergie et du Développement minier, Ruth Nankaburwa, a affirmé que le pays était « sur la bonne voie » pour devenir un producteur de pétrole d’ici la fin de 2025, depuis la découverte en 2006 d’importantes réserves de pétrole brut autour du lac Albert, à la frontière avec la République démocratique du Congo (RDC).