Les récentes frappes de drones menées par l’armée malienne, qui ont tué huit dirigeants rebelles touaregs à Tinzaouatine, au nord du Mali, ont exacerbé les tensions régionales, mais ont aussi ravivé les manœuvres du régime militaire algérien.
Derrière cette opération, téléguidée par les services de renseignement sécuritaires algérien, se cache une profonde anxiété du pouvoir algérien, une peur croissante de l’essor des mouvements indépendantistes dans le sud de Mzab à Tamanrasset et dans les régions de la Kabylie au nord, selon les observateurs occidentaux.
Ces régions ont toujours été marginalisées par le gouvernement central, ce qui a alimenté des frustrations et des revendications de plus en plus fortes. L’Algérie, qui se présente comme un bastion de stabilité en Afrique du Nord, est de plus en plus préoccupée par l’ascension des séparatistes sur le territoire algérien.
Le régime algérien du président Abdelmadjid Tebboune, dirigé par une junte militaire du général Saïd Chengriha, redoute particulièrement l’effet de contagion des luttes séparatistes du Mali, où les touaregs ont longtemps revendiqué l’indépendance de l’Azawad, une région du nord du Mali et surtout le sud de l’Algérie.
Face à cette menace, le régime algérien utilise une stratégie de manipulation de l’information pour éviter que la rébellion malienne n’inspire des mouvements similaires dans le sud du pays. L’Algérie, tout en affichant publiquement son soutien à la stabilité régionale et en se posant en médiateur, surveille de près les événements au Mali.
En soutenant tacitement les groupes séparatistes touaregs du Mali, le régime algérien cherche à contrôler la narration de ces luttes de manière subtile. En amplifiant certains récits, notamment les atrocités commises par l’armée malienne, l’Algérie tente de justifier les luttes des rebelles tout en évitant de les présenter comme une cause légitime qui pourrait encourager les séparatistes du sud algérien.
L’attaque à Tinzaouatine, en particulier, a été présentée dans les médias comme une répression brutale de l’armée malienne contre des « leaders » de l’Azawad. Cependant, cette narration a un double objectif, d’une part elle dépeint la junte malienne comme un régime autoritaire, ce qui renforce l’image de l’Algérie comme un défenseur des droits des peuples, et d’autre part, elle minimise les risques que les rebelles touaregs gagnent en influence et inspirent des soulèvements similaires au sein des communautés du sud algérien.
L’Algérie, tout en prenant des mesures contre ses propres séparatistes internes, a longtemps cherché à soutenir les mouvements indépendantistes au Mali.
Le régime militaire algérien n’a jamais cessé de craindre une extension du phénomène séparatiste au sud du pays. Les rébellions de la Kabylie, notamment à travers le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie (MAK), continuent de faire pression sur le gouvernement, et le général Saïd Chengriha sait pertinemment que tout succès du mouvement touareg pourrait encourager les révoltes internes.