Dans le centre du Mali, les agents de santé chargés de vacciner les enfants contre une épidémie de rougeole ont dû négocier avec des groupes jihadistes contrôlant les villages afin d’obtenir leur autorisation pour administrer les vaccins.
Les groupes jihadistes s’opposent fréquemment aux campagnes de vaccination en raison de barrières religieuses, souvent alimentées par une hostilité envers l’Occident et sa lutte contre le terrorisme. Cette problématique est mise en lumière par une étude parue fin janvier dans la revue BMJ Global Health, intitulée « Les implications du conflit sur la vaccination au Sahel ».
Cependant, face à l’ampleur des ravages causés par la rougeole, les jihadistes ont finalement accepté la vaccination. « Ils ont eux-mêmes sollicité les services de santé pour vacciner les enfants », explique Moussa, responsable d’une ONG malienne.
Ce cas spécifique du Mali illustre une réalité plus large dans la région du Sahel, où la violence jihadiste et l’instabilité politique perturbent gravement les programmes de vaccination.
La destruction des infrastructures de santé, les restrictions imposées aux organisations humanitaires et les déplacements massifs de populations compliquent le maintien des campagnes de vaccination de routine.
Tout comme au Mali, l’ONG Médecins Sans Frontières a été contrainte de suspendre ses activités dans des zones frappées par les violences jihadistes, telles que Nampala (au centre du Mali) et Djibo (au nord du Burkina), à la suite d’attaques contre son personnel et ses installations en octobre.
Au Niger, des syndicats de la santé ont également dénoncé l’enlèvement d’infirmiers par des groupes jihadistes, vraisemblablement pour soigner leurs blessés dans l’ouest du pays.
Les régimes militaires au pouvoir au Mali, au Niger et au Burkina Faso depuis les coups d’État de 2020 à 2023 exercent une pression croissante sur les ONG, y compris celles qui travaillent dans le secteur humanitaire.
Le gouvernement du Niger a récemment demandé au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de quitter le pays, et en novembre, il a révoqué les autorisations d’exercer de l’ONG française Acted et de l’association nigérienne Action pour le bien-être (ABPE).
Le Sahel continue de faire face à des défis majeurs pour lutter contre les épidémies et fournir des services de santé, alors que les populations civiles sont prises en étau entre les violences jihadistes et les restrictions imposées par les régimes militaires. La situation souligne l’urgence de trouver des solutions durables pour assurer la sécurité des travailleurs humanitaires et garantir l’accès des enfants aux vaccins essentiels.